“Si l’on me donnait à choisir entre un gouvernement sans presse ou une presse sans gouvernement, je n’hésiterai pas à choisir la dernière proposition”.
L’auteur de cette phrase n’est ni plus ni moins que Thomas Jefferson, l’un de pères fondateurs des États-Unis.
« Jeff » avait bien compris que l’un des piliers de la démocratie résidait dans la capacité du peuple à se forger une opinion juste sur l’état d’une société.
Sans presse, comment un citoyen pourrait t-il être en mesure de choisir “rationnellement” ses représentants politiques ?
À l’inverse, une société qui dispose d’une presse libre et juste améliore la compréhension de la société par les individus, solidifiant ainsi le système démocratique.
Pourtant, cet idéal semble s’éloigner depuis quelques années.
Alors que les nouvelles technologies de l’information ont révolutionné notre manière de consommer l’information, et qu’elles regorgent de possibilités pour améliorer l’esprit de concorde, de plus en plus d’études tendent à prouver qu’au contraire, ces technologies l’affaiblissent.
Par exemple, une étude menée par l’organisation “More in Common” aux États-Unis tente de mesurer l’évolution du “Perception Gap” – autrement dit, la capacité d’un individu à comprendre le point de vue de son co-citoyen.
L’étude tend à démontrer que plus un individu consomme d’informations et de presse (dont une grande partie se fait via les réseaux sociaux), plus ce Perception Gap est important.
Et donc moins les citoyens américains parviennent à se comprendre mutuellement.
Un citoyen démocrate aura tendance à penser qu’une majorité des républicains sont racistes, alors que cette proportion est en réalité beaucoup plus faible.
La presse, censée être un ciment de la société, est donc plutôt devenue un lieu de fracture.
Les réseaux sociaux y joueraient un rôle de différentes manières :
Les utilisateurs les plus “radicaux” sont ceux qui postent le plus. Leur voix recouvre donc celle d’une « majorité silencieuse ».
Chaque utilisateur dispose de son fil d’actualité hyper-personnalisé, ce qui forge une perception du monde unique plutôt que commune.
Et selon une autre étude, les fake news se propagent 6× plus vite sur les réseaux que les informations véridiques.
La « bonne nouvelle », c’est que nous sommes bien plus en accord sur un tas de sujets que nous pouvons être amenés à le penser.
La mauvaise nouvelle, c’est que les dérives et les fractures du monde numérique déteignent sur la société réelle, à l’image de l’assaut du capital en janvier 2021.
Alors que de grands défis (la crise climatique n’en étant pas des moindres) s’annoncent à court terme, il apparaît capital d’utiliser le monde numérique pour inventer une nouvelle presse, qui permette de mettre en exergue nos convergences plutôt que nos divergences.
Et pour vous, quels sont les sujets les plus à même de nous rassembler ?