L’hypothèse de la terre rare

« Où sont-ils ? »

La question est brûlante. Elle fait tourner le monde scientifique en bourrique depuis des décennies.

Ils, se sont bien les extra-terrestres.

Alors que nous demeurons ébahis par l’infinité grandissante de notre univers, de ses étoiles, de ses planètes, et donc de ses potentiels lieux de vie, le constat reste sans appel : les aliens sont introuvables.

De nombreuses explications, plus farfelues les unes que les autres, tentent d’expliquer le fameux « paradoxe de Fermi ».

L’une d’entre elles suggère que la Terre possède une histoire et des caractéristiques extraordinaires dans notre univers : c’est l’hypothèse de la Terre rare.

L’hypothèse de la Terre rare

Selon cette hypothèse, si l’homme ne parvient pas à détecter des extra-terrestres, c’est parce que le développement d’une vie intelligente serait un processus tellement complexe qu’il n’aurait pu aboutir nulle part ailleurs que sur Terre.

Autrement dit, nous serions la seule espèce intelligente de l’univers.

Une simple affaire de probabilités.

L’hypothèse de la Terre rare n’est pas soutenue par une, mais par de multiples caractéristiques extraordinaires dont bénéficierait notre planète pour en faire un lieu habitable. En voici un florilège.

Le champ magnétique de la Terre

Le coeur de notre planète est constitué d’un noyau de fer solide qui baigne dans du fer liquide. Comme la rotation de ce noyau génère un champ magnétique, la Terre se voit protégée des radiations meurtrières du Soleil. Cela a certainement favorisé l’émergence de la vie telle que nous la connaissons.

Vision d’artiste du champ magnétique de la Terre

Jusqu’ici, rien de bien nouveau.

Ce qui est remarquable, c’est que la présence d’un champ magnétique immunisant comme celui de notre planète pourrait être une exception dans notre univers. Nos planètes « cousines », Mars et Vénus, en sont par exemple dépourvues.

Malgré tout, nos connaissances quant aux champs magnétiques d’exoplanètes demeurent limitées, et sont donc dans l’incapacité d’appuyer cet exemple.

La Terre et la tectonique des plaques

L’extrême activité qui a lieu au centre de la Terre jouerait un autre rôle favorable au développement de la vie. En effet, juste au-dessus du noyau, se situe le manteau terrestre. En son sein, d’importants échanges de chaleur ont lieu, cause directe d’un phénomène géologique fondamental : la tectonique des plaques.

Illustration de la structure terrestre

Pour Peter Ward et Donald Brownlee, auteurs du livre « Rare Earth », ce phénomène serait clé pour promouvoir la biodiversité terrestre. Si la tectonique des plaques permet aux continents de se mouvoir, elle permet alors aux espèces de s’étoffer sous des climats différents.

En effet, les espèces peuvent échanger des caractéristiques entre elles lorsque leurs continents respectifs sont rapprochés par la tectonique des plaques. À l’inverse, elles peuvent en développer de nouvelles, propres à leur climat, quand elles sont éloignées par le déplacement des terres.

La tectonique des plaques permet aux espèces de se diversifier.

L’émergence d’une vie intelligente devient alors un scénario plus crédible. À l’image d’un jeu de loterie, si des millions d’espèces supplémentaires y participent, la probabilité d’obtenir un vainqueur augmente.

Mais ça n’est pas tout.

La tectonique des plaques nous aurait rendu un autre service. En effet, ce phénomène en aurait déclenché un autre, nommé la « Grande Oxydation« . L’évènement en question aurait permis à la Terre de bénéficier d’échanges gazeux avec les réservoirs du manteau terrestre.

Un surplus d’oxygène aurait alors été disponible à la surface terrestre, permettant une nouvelle fois à la vie de se développer dans de bonnes conditions.

La tectonique des plaques est un phénomène beaucoup moins marqué chez nos planètes voisines… Voir inexistant, comme sur Mars.

Notre planète est-elle réellement si singulière ?

La Lune

La Lune est un astre colossal. C’est même le plus grand des satellites planétaires par rapport à la taille de la planète autour de laquelle elle orbite.

À l’origine, notre satellite aurait été crée par un impact entre la Terre et une autre planète. Les débris de cette collision constitueraient aujourd’hui la Lune.

Ce choc cosmique aurait donné à notre planète sa rotation extrêmement rapide, à l’image du mouvement donné à une toupie par un enfant. La Terre tournant plus vite autour d’elle même, elle est exposée de manière plus fréquente à la lumière de notre étoile. Profitants d’un bain de Soleil, les végétaux ont pu enclencher un processus fondamental à l’évolution du vivant : la photosynthèse.

La collision donnant naissance à la Lune aurait donc eu un effet direct sur la photosynthèse, et donc sur la vie.

Mais ce choc cosmique a peut-être eu d’autres avantages.

L’inclinaison de l’axe des pôles déterminant l’alternance des saisons, la collision à l’origine de la Lune aurait pu donner à la Terre sa légère inclinaison (23,5° environ).

Cet axe permet aux espèces terrestres de bénéficier de saisons tempérées, conciliables avec l’existence d’eau liquide si précieuse pour le vivant.

L’attribut alt de cette image est vide, son nom de fichier est Capture-d’écran-2020-03-22-à-17.59.59-1024x497.png.
Le phénomène des saisons, illustré

L’axe de rotation de notre planète oscille légèrement, ce qui explique les grandes périodes glaciaires qui ont eu dans son histoire. Sans la Lune, l’oscillation serait beaucoup plus violente. En effet, parce qu’il est massif, notre satellite stabilise l’axe de rotation terrestre. La force gravitationnelle qu’elle exerce sur la Terre est extraordinaire.

Ce phénomène empêche des épisodes climatiques chaotiques de survenir, favorisant le développement du vivant.

Jupiter

Nous pouvons également remercier Jupiter de son travail. On la surnomme même « l’aspirateur du Système solaire ».

En effet, l’attraction gravitationnel qu’exerce une planète aussi massive permet de dévier une quantité phénomènale d’astéroïdes, évitant des collisions trop fréquentes avec la Terre.

Un physicien nommé George Wetterill suggérait qu’en l’absence de Jupiter, les impacts entre notre planète et d’autres objets célèstes seraient de 1000 à 10 000 fois supérieurs au chiffre actuel.

Si les mammifères ont pu se développer après l’extinction des dinosaures grâce à un astéroïde, on peut cependant s’imaginer que leur évolution aurait été grandement ralentit par d’autres collisions.

Les planètes aussi massives que Jupiter ou Saturne sont relativement rares dans les autres systèmes planétaires (environ 10% d’entre eux).

Une nouvelle fois, la Terre semble avoir obtenu la faveur des dieux.

L’extinction des dinosaures

Il y a des dizaines de millions d’années, le règne animal était assuré par les dinosaures. Par leur domination écrasante, les puissants T-Rex et les fourbes Vélociraptors empêchaient les mammifères de sortir de leurs cachettes. En cohabitant avec des prédateurs aussi compétents, notre classe d’animaux n’avait aucune chance de croître.

Et puis, un jour…

Un astéroïde frappa de plein fouet la planète Terre. Contrairement à ce que l’on peut penser, cet impact n’aurait pas décimé les dinosaures à tous les coups.

Premièrement, l’astéroïde en question a touché une surface continentale, rendant l’impact extrêmement violent. Il eut été plus probable que le bolide touche une surface océanique, notre planète étant principalement constituée d’eau.

La péninsule de Yucatán, point d’impact de l’astéroïde ayant causé l’extinction des dinosaures

Deuxièmement, ça n’est pas l’impact qui a décimé la totalité des dinosaures. Ce sont en fait les particules libérées par l’impact, qui ont de fait empêché les rayons du Soleil d’atteindre la surface terrestre. Résultat : un « hiver nucléaire » a exterminé des dinosaures incapables de produire des doudounes.

D’après un papier scientifique très récent, le point d’impact de l’astéroïde aurait été la pire localisation possible pour les dinosaures… L’impact aurait brûlé des roches riches en pétrole, libérant une quantité de suie suffisante pour bloquer les rayons du soleil… Et causer un hiver nucléaire fatal pour les dinosaures.

L’étude indique que seulement 13% de la surface terrestre est constituée de ce type de roches meurtrières.

Aussi, le géologue Sean Gulick en rajoute une couche : « Les régions du monde où un astéroïde de 12 kilomètres de largeur peut provoquer un tel changement atmosphérique sont rares ».

L’hypothèse de la Terre rare reste une hypothèse

La vie intelligente pourrait s’être développée sous des conditions extrêmement rares, sans lesquelles je n’aurais pas pu écrire cet article.

Cependant, pour tout ce qui concerne la vie extraterrestre, l’espèce humaine est mauvaise en probabilités. Nous n’avons qu’un exemple de vie dans l’univers… Le nôtre. C’est un échantillon peu représentatif, vous en conviendrez.

Pour beaucoup de scientifiques, l’hypothèse de la Terre rare n’est pas une solution plausible au paradoxe de Fermi.

Chaque année, nous découvrons de nombreuses planètes semblables à la nôtre. Nous ne disposons tout simplement pas des données suffisantes sur leurs caractéristiques pour les mettre en contradiction avec cette hypothèse.

Mais il faut bien donner une vertu à l’hypothèse de la Terre rare.

En racontant la route complexe que doit emprunter la vie pour fleurir, elle peut donner à chaque seconde de notre existence une nouvelle dimension, plus grandiose et plus vivante.

Leave A Comment

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *